D’aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours aimé les mots.
Sûrement un peu trop selon ma famille et mes amis les plus proches.
Mais moi j’ai toujours cru que les mots avaient le pouvoir de toucher les cœurs.
Depuis peu cependant, je ressens un besoin de silence.
Sûrement est-ce avec l’âge et a fortiori la sagesse qui en découle, mais je ne ressens plus le besoin de raconter ma vie en long, en large et en travers, à qui veut bien l’entendre - comme ça a été le cas pendant bien trop longtemps.
Autant vous dire que cela peut causer un léger décalage lorsque vous vous situez à 14 000 km de vos proches et que, chaque jour, vous voyez les notifications s’accumuler sur votre téléphone, témoignant de leurs inquiétudes à votre égard.
D’autant plus quand vous, vous êtes en train de vivre tout ce dont vous avez toujours rêvé et être, de ce fait, dans un état proche du nirvana.
Du coup, bien que j’aie choisi, dans un premier temps, d’envoyer péter les conventions et de passer sous les radars le temps de mon voyage, j’ai finalement décidé que j’allais m’y prendre un peu différemment et de manière un peu plus originale pour la suite de mon voyage.
On remerciera au passage Matthieu pour l’idée, qui me permet ainsi d’éviter (AVIS À BON ENTENDEUR) ce que j’aime le moins au monde, à savoir : les longs et interminables appels téléphoniques.
Le lien vers son substack ici :
Non pas que je n’aime pas converser de vive voix avec vous, mais j’ai toujours vu les appels téléphoniques comme une parfaite entrave à ma liberté, que je chéris tant, et donc, par conséquent, comme une contrainte.
Le pire dans tout ça, c’est qu’une fois qu’on est à l’autre bout du monde, les gens attendent de vous, à chaque appel, que vous racontiez ce qu’il s’est passé dans votre vie depuis la dernière fois.
Mais ce n’est pas comme aller boire trois cafés dans la semaine avec trois amis différents, puisque les gens considèrent que, puisque vous êtes celle qui est partie, vous avez forcément quelque chose de plus intéressant à raconter qu’eux.
S’installe alors un énorme déséquilibre où vous vous retrouvez à raconter votre vie en premier pendant plusieurs minutes et, quand vous demandez par la suite à votre interlocuteur d’en faire de même, celui-ci vous répond toujours : « Oh tu sais, moi… la routine… rien de bien intéressant à raconter. »
Vous voilà maintenant à mener un réel interrogatoire de police, à essayer d’obtenir des informations sur les quatre grands thèmes principaux de la vie d’un individu de type lambda, selon notre vision contemporaine occidentale que je chéris tant, à savoir :
le travail,
la famille,
la santé,
et si vous êtes chanceux (non je plaisante !!!) le couple.
Alors, pour m’éviter d’une part de passer l’équivalent de quatre jours entiers au téléphone à mon arrivée sur la terre australienne avec chacun d’entre vous, j’ai décidé de relater dans un texte tout ce qui m’a traversée au cours de ce dernier mois, en essayant de vous rassurer sur le fait que :
Oui, je vais bien, pour ne pas dire parfaitement bien ;
Non, je n’ai pas pris de drogue ;
Non, je n’ai pas été embrigadée dans une secte.
J’espère qu’au travers de ce texte, vous vous imaginerez le son de ma voix et ainsi, avoir l’impression de partager avec moi la boisson chaude de votre choix sur une de vos terrasses préférées.
Difficile toutefois de raconter l’équivalent d’une expérience de vingt-huit jours, pour le moins enrichissante, sans ennuyer les lecteurs et surtout sans en dire trop.
Parce que bon, j’essaye quand même de vous convaincre que j’aspire à parler de moins en moins. Il serait alors fortement malvenu de ma part de pondre par la suite un texte de trois cents pages (même si vous savez, tout comme moi, que j’en serai bien évidemment capable…).
À l’heure où j’ai décidé d’entamer ce texte, sachez que je suis assise sur les marches qui surplombent le Gange (rivière dite « sacrée » par les Indiens, autrement appelée « Maha Ganga », qui signifie le Gange Suprême).
Défilent devant moi :
de nombreux Indiens de type mâle qui tapent leurs plus belles poses pour leurs followers (et oui, ici, je constate que ce sont davantage les hommes qui tapent la pose avec leurs potes),
des groupes de femmes qui viennent avec plusieurs enfants, de sorte que je ne peux m’empêcher de me demander comment fonctionne le système éducatif en Inde (sans toutefois jamais être foutue de me renseigner),
des chiens errants,
quelques touristes qui viennent méditer tout en regardant l’horizon.
Alors, autant vous dire qu’on est franchement loin de l’image de Rishikesh que j’avais, avec des yogis partout et de nombreux saddhus (ascètes indiens vêtus de tenues orange) de part et d’autre au bord du Gange.
Il fait beau et chaud, peut-être 28 degrés, comme tous les jours depuis mon arrivée.
L’eau est d’un bleu/vert assez spectaculaire et, surtout, contrairement à ce que je pensais, elle est propre et sans déchet apparent, malgré le fait que :
l’Inde est le pays le plus pollué du monde,
les Indiens brûlent leurs morts sur cette rivière sacrée.
Elle est cependant glacée (parole de grosse frileuse), mais tout le monde se baigne dedans, eu égard à la haute valeur spirituelle qui lui est accordée.
De même, et contrairement à ce que je pensais une fois de plus avant d’arriver ici, les rues sont bien plus envahies d’odeurs de bouse de vache que d’encens et vous y risquez votre vie à chaque fois que vous vous y aventurez. Car ici, il est impossible de flâner : concentration maximale pour pouvoir slalomer entre les gens, les voitures, les scooters, les motos, les chiens, les vaches avec en arrière donc le doux bruit des klaxons.
Autant vous dire que pour quelqu’un (en l’espèce : moi) qui n’aime pas la foule et le bruit et qui était venu chercher du calme et de la tranquillité à Rishikesh, j’ai vite compris que je n’allais pas trop m’éloigner de mon lieu d’hébergement.
Pour cette raison, mes journées se sont, à quelques exceptions près, déroulées dans un diamètre d’un kilomètre carré, incluant :
mon école,
le Little Buddha Café,
le Freedom Café,
la « bakery » du bas de la rue qui vend des croissants qui sont loin d’être des croissants mais que j’ai quand même dégommés.
(C’est le moment où vous constatez que cette newsletter sera pleine de listes et de paragraphes séparés, ce qui n’est autre qu’un petit reste de ma formation de juriste en cabinet d’avocat <3).
Pour cette raison, je ne suis absolument pas en capacité de vous donner beaucoup d’informations sur Rishikesh, et encore moins sur l’Inde, puisque je ne suis pas vraiment partie en excursion (ce dont j’avoue avoir un peu honte).
Mais pour être tout à fait honnête, j’ai réalisé une fois sur place que j’avais peut-être un peu sous-estimé la nécessité d’une préparation mentale pour l’Inde ou, a minima, l’utilité d’avoir voyagé auparavant dans des pays d’une extrême pauvreté.
Aussi, vous trouverez sous le format d’une liste un peu fourre-tout les souvenirs qui me resteront de l’Inde après un mois passé dans ce pays :
L’Inde est environ 6x plus grande que la France ;
L’Inde compte plus de vingt langues officielles dont l’hindi, le bengali et une muuuuultitude de dialectes (on m’a dit plus de 25 000,00 mais je n’ai rien trouvé sur internet de tel alors je ne sais quoi trop vous dire si ce n’est de ne surtout pas retenir cette information) ;
L’anglais est couramment utilisé à Rishikesh, si bien qu’il est courant d’entendre des Indiens parler anglais entre eux. D’ailleurs, un de nos professeurs nous a indiqué qu’il parlait mieux anglais qu’hindi, car la majorité de leurs matières étaient en anglais à l’école, alors qu’il était capable de parler hindi sans toutefois pouvoir l’écrire ;
Les locaux ont un profond amour pour les caméras de surveillance. À titre d’exemple, notre salle de classe était équipée de trois caméras. Je vous laisse donc imaginer le nombre de caméras dans un commerce ;
Ici, tout le monde se racle la gorge allègrement sans gêne et crache ce joli élixir un peu partout, et ce, peu importe si vous êtes à côté d’eux (ou pire encore, derrière eux dans la voiture : miam miam le voyage de six heures de route avec le conducteur de taxi bien malade pour me rendre de Delhi à Rishikesh qui, pour couronner le tout, a passé tout le trajet à appeler tout son répertoire en haut-parleur ou scroller son feed Instagram. T’inquiète, maman, c’est fini et je suis vivante) ;
La pollution est telle qu’elle vous pique les yeux et vous laisse une jolie sensation dans la gorge au réveil et davantage les jours où des pics de pollution se font ressentir ;
Même à Rishikesh, qui est censée être une ville plus « verte », le paysage est sans cesse recouvert d’une fine couche de pollution quotidienne (qui peut vraiment s’intensifier selon les jours) ;
Vos pieds restent peu de temps propres après la douche et il devient de plus en plus difficile de les laver correctement au fil du temps ;
Quand vous marchez dans la rue et que vous sentez que votre pied est légèrement humide, vous ne savez jamais s’il s’agit simplement d’eau ou d’un joli mélange d’eau et de bouse de vache qui constitue à peu près 5 % du sol de Rishikesh, mais au vu de la couleur, toute émission de doute est légitime ;
D’un point de vue occidental, il ne semble pas y avoir beaucoup de règles concernant la conduite. Cependant, et aussi étonnant que cela puisse paraître, les voitures ne sont pas accidentées et sont plutôt en bon état, à l’exception des voitures abandonnées sur le bord de la route depuis plusieurs décennies et qui attendent sagement de se désintégrer ;
Il n’y a pas de système de collecte de déchets, de sorte que les gens les brûlent devant leur propre maison ou tout simplement les entassent devant chez eux ;
Les Indiens adorent vous demander « Where are you from ? » et ensuite vous demander de prendre une photo avec eux ;
Les Indiens ont un rapport… étonnant à la photo. Certains d’entre eux n’hésitent pas, au restaurant, à se lever et prendre leur plat avec eux et vous demander de prendre une photo à votre table si celle-ci a une meilleure vue que la leur, juste pour leur photo (true story) ;
La bouffe indienne est incontestablement excellente, même si, quand on vous dit que le plat n’est pas « spicy », vous pouvez être sûr que vous allez pleurer en le mangeant ;
Quand vous commandez un plat au restaurant, il y a 50 % de chance que l’on vous serve quelque chose que vous n’avez pas demandé ;
Les Indiens travaillent pour la plupart 7 jours sur 7 et sur une tranche horaire TRES large ; j’ai d’ailleurs eu la surprise de découvrir que les serveurs de mon café chouchou dormaient dans le restaurant (puisqu’ici, vous mangez très souvent assis sur des coussins disposés sur le sol) ;
L’Inde est très colorée, ce qui a ravi mes pupilles ;
À l’aéroport, ce sont des militaires qui gèrent la sécurité et croyez-moi, ce ne sont pas les plus souriants.
Voilà dans les grandes lignes ce que je retiendrai de mon expérience rishikeshienne.
Je vous l’accorde, ce n’est pas grand-chose.
Mais il faut cependant reconnaître que visiter l’Inde n’était pas l’objet de mon excursion puisque je suis venue ici pour suivre une formation de « yoga teacher training ».
Wow, quatre pages avant de balancer la raison de ma présence en Inde.
Passons donc maintenant à la narration de mon expérience au Pyramid Yogshala.
L’école est divisée en plusieurs bâtiments puisqu’il s’agissait originellement d’un café, qui est ensuite devenu une auberge de jeunesse pour finalement se transformer en école de yoga.
Elle est tenue par une famille indienne (dont j’ai omis le nom), qui a construit l’ensemble des bâtiments il y a 55 ans à partir de rien, et dont de nombreux membres vivent sur place.
S’agissant de la surface, je ne saurais la chiffrer.
Tout ce que je peux vous dire, c’est que le terrain est en pente et qu’il faut faire un peu de grimpette quand on revient un peu trop plein(e) du café. Ceci est loin d’être déplaisant puisque cela permet d’avoir une merveilleuse vue sur l’autre rive du Gange selon où vous vous trouvez dans l’école, et de l’autre côté, d’avoir un joli point de vue sur la forêt.
S’agissant de l’hygiène des locaux : clairement, on n’est pas sur du cinq étoiles.
Mais au vu du tarif que j’ai payé (à peine 500 euros pour un mois de formation incluant logement et nourriture matin, midi et soir, ce qui constitue l’une des moins chères que j’ai pu trouver pour 28 jours), je m’attendais franchement à pire.
Bon, je crois qu’on se souviendra tous de l’état des toilettes de notre salle de classe et de l’odeur qui va avec pendant un mois, mais encore une fois, je m’attendais à pire.
À propos des toilettes (Robin, celle-là, elle est pour toi <3).. En Inde, on n’utilise pas de papier toilette mais une douchette pour se rincer une fois qu’on a fini notre affaire. Il est alors commun d’utiliser sa main gauche pour se nettoyer et sa main droite pour manger (au risque de se faire mal regarder si vous utilisez malencontreusement la gauche pour manger).
CEPENDANT, comment utiliser sa main gauche lorsque les toilettes ne sont pas équipées de savon et comment faire une fois qu’on a le cul trempé et donc dégoulinant, et qu’il n’y a rien pour vous essuyer ?
Vous priez pour que le jet soit suffisamment fort pour nettoyer correctement vos parties intimes,
Vous acceptez le fait que votre bas sera trempé sur cette même zone et donc que tout le monde sache d’où vous venez, après avoir vainement tenté de remuer vos fesses de droite à gauche pour les sécher.
Aussi, bien que je comprenne l’aspect hygiénique et écologique d’une telle technique, j’avoue avoir eu du mal à m’y faire.
Raison pour laquelle je m’arrangeais toujours pour faire ma grosse commission dans ma salle de bain afin de pouvoir me laver le cul comme il se doit et m’essuyer avec ma serviette de douche ensuite (et donc veiller doublement à m’être bien lavé le cul, à défaut d’avoir une mauvaise surprise lors de la prochaine sortie de douche).
Pas très compliqué, me direz-vous.
Sauf que d’une part, je partage ma chambre avec trois nanas et que d’autre part, les passages aux toilettes sont plutôt colorés et bruyants au vu du nombre d’épices ingurgitées par jour (Papa, je t’entends déjà te dire : « Putain, même à 14 000 kilomètres, elle trouve le moyen de parler de sa merde. Prochain paragraphe, les règles ??? Rassure-toi, c’est pour la prochaine newsletter. »)
Ce sera tout pour le thème toilettes, passons au suivant : la chambre.
Je partage ma chambre avec trois autres nanas qui font partie de mon groupe : une française, une argentine et une danoise. Difficile pour moi au début d’accepter l’idée de partager ma chambre au vu du rythme vraiment soutenu que l’on a. Partager sa chambre, c’est accepter le fait d’être réveillée plus tôt que vous ne l’aviez prévu car vos colocataires n’ont pas la même routine, et, à l’inverse, intégrer qu’à 21 h, voire 20 h 30, celle qui se lève le plus tôt se couche la plus tôt et donc que vous devez agir en conséquence. Enfin, inutile de vous dire qu’il est impossible d’avoir un moment « solo » dans votre chambre ou encore de faire une sieste quand votre emploi du temps vous le permet sans la susceptibilité d’être dérangée.
Mais quoi de mieux pour travailler sur soi que d’être bousculée dans ses habitudes, right ? S’il y a bien une leçon à retenir de tout cela, c’est que l’être humain est capable de s’adapter à tout et que j’ai réussi, avec brio, à lâcher prise.
S’agissant de mon groupe, il est composé de seize personnes de nationalités assez variées de personnes âgées de 20 à 80 ans.
Pas toujours évident là encore de dealer avec les personnalités et l’éducation de chacun, mais une fois encore, je suis venue ici pour apprendre des choses et cela m’a appris davantage l’importance de la tolérance, la patience, le lâcher-prise et l’adaptabilité.
Ceci a été le plus grand défi de mon aventure indienne : comment obtenir la paix intérieure lorsque l’on a qu’une envie, c’est d’hurler à tous nos gentils petits camarades de fermer leur clapet pour qu’on puisse faire ce pour quoi on est venu ici, soit : apprendre.
De plus fort, chacun de nos cours commence par une sorte de « méditation » collective.
Tout le monde s’assoit en posture méditative, se concentre durant plusieurs respirations pour s’ancrer dans le moment présent puis, on place ses mains au centre de sa poitrine en forme de prière et viennent alors trois récitations collectives, à voix haute, du mantra « OM » (qui représente la vibration originelle qui a donné naissance à l’univers).
Là, c’est le moment où vous vous demandez où ai-je atterri, si j’ai fumé de l’herbe ou si ce voyage m’a rendu encore plus perchée qu’avant.
WARNING : POINT CULTURE TRÈS LONG CI-DESSOUS
à sauter si vous considérez que vous êtes suffisamment culturé
point visuel indiquant la fin quelques lignes plus bas
Pour comprendre la suite de ma rédaction, il importe de savoir que le yoga ne consiste en rien à la seule pratique des postures.
Avant d’atterrir ici, j’avais tendance à dire que le yoga était une pratique holistique, qui allie postures physiques, respiration, méditation dans le but d’armoniser le corps, l'esprit et l’âme.
Je sais désormais que cette définition est non seulement réductrice mais surtout très erronée puisque de nombreux yogis ne pratiquent même pas les postures.
Le mot « yoga » signifie « union » en sanskrit.
Mais qu’est-ce que le sanskrit, me direz-vous ?
Il s’agit de la langue sacrée dans laquelle de nombreux textes spirituels et philosophiques ont été écrits il y a des millénaires. Bien qu'il ne soit plus une langue parlée couramment, il est étudié et utilisé dans les rituels religieux, la recherche académique et la méditation. On pourrait un peu la comparer au latin.
C’est dans cette langue qu’ont été écrits les « Vedas » qui constituent les textes sacrés à la base de l’hindouisme, lesquels mentionnent des pratiques méditatives et des rituels qui posent les bases du yoga. On rapporte que les Vedas existaient sous forme orale et ont été transmis de maître à élève pendant des générations, jusqu’à ce qu'ils soient rapportés par écrit en Inde vers 1500-500 avant JC (la Période dite Védique).
Aussi, on trouve dans les « Vedas » mention de diverses pratiques spirituelles, donc les ébauches des pratiques de yoga.
Mais c’est finalement entre 200 avant J.-C. et 400 après J.-C. que seront rédigés le "Yoga Sūtra" de Patañjali, le texte fondateur du yoga, composé de 195 aphorismes (sūtras) que l’on regroupe communément en 8 catégories :
Yama,
qui sont cinq principes moraux universels qui guident notre relation aux autres, à savoir :
Ahimsa : Non-violence.
Satya : Vérité.
Asteya : Ne pas voler.
Brahmacharya : Maîtrise de soi (souvent interprétée comme la modération).
Aparigraha : Non-possessivité, ne pas être avide ;
Niyama,
qui sont cinq règles de conduite intérieure, des pratiques personnelles pour cultiver une discipline spirituelle et développer des qualités positives, à savoir:
Shaucha : pureté.
Santosha : contentement.
Tapas : discipline.
Svadhyaya : l'étude de soi.
Ishvarapranidhana : la dévotion à l’universel.
Asanas,
soit les postures que l’on a tous en tête quand on visualise le yoga. TOUTEFOIS, et vous allez tomber à la renverse, les postures sont pratiquées non pas pour paraître bonnasse sur Instagram dans un petit legging moulant, mais dont le seul et unique but est de pouvoir rester suffisamment longtemps dans une posture de méditation. Il s’agit de trouver du confort dans quelque chose qui n’est naturellement pas confortable ! On pratique donc les asanas non pas en vue de gagner en flexibilité et mobilité à proprement parler, mais bel et bien pour pouvoir méditer.
Pranayama,
soit une discipline visant à contrôler son souffle dans le but d’accroître et contrôler son « prana » (la part d’énergie universelle dont on dispose chacun en nous) ;
Pratyahara,
soit le contrôle de nos cinq sens vers l’intérieur et non vers l’extérieur comme nous en avons l’habitude en écoutant, touchant, voyant, goûtant et sentant le monde. Il s’agit d’apprendre le retour vers Soi ;
Dharana :
soit la concentration dans le but de calmer son mental ;
Dyana :
soit la méditation, qui ne se limite pas à un simple état de calme intérieur comme on peut l’imaginer chez nous, mais plutôt à un moment où le mental est si calme qu’il nous permet une réelle connexion avec le « Divin »,
Samadhi,
soit le goal suprême, l’éveil : l’état de conscience le plus élevé que l’on puisse atteindre grâce à la méditation.
Grosso modo, il convient d’agir et de pratiquer les six premiers membres du yoga dans l’unique dessein de parvenir au septième qui nous permettra d’atteindre le huitième.
Ça vous en bouche un coin, n’est-ce pas ?
En définitive, le yoga est une discipline spirituelle visant à unir l’âme individuelle (Atman) avec l'universel (Brahman), d’où le terme « union ».
Il est un chemin vers l’éveil et la libération (moksha), englobant non seulement les postures (asanas), mais aussi des pratiques et le respect de principes éthiques.
Cependant, et comme je vous le disais, certains yogis ne pratiquent pas les postures de yoga car ils suivent un autre « chemin » de yoga que celui décrit ci-dessus, qui constitue le « Raj » yoga (ou « yoga Royal ») et qui est celui qui demande le plus de discipline.
Je décide de m’arrêter ici pour l’instant culture et vous invite à vous renseigner sur les différents chemins du yoga si la question vous intéresse réellement, mais sachez que le sujet est extrêmement vaste et ô combien intéressant.
Enfin, je finirai simplement par dire que le yoga n’est aucunement une religion, et qu’il ne s’agit pas davantage de croyances. Le yoga est une philosophie de vie.
Allé hop, vous avez là votre plus beau sujet de débat pour les futurs repas de famille interminables de Noël. Ne me remerciez pas.
BRAVO AUX COURAGEUX
De la même manière que l’on commence les cours par la récitation d’un mantra, tous les cours se terminent par la récitation d’un autre mantra. Ici, il n’est donc pas d’usage de faire sonner une cloche au son insupportable qui reste ancrée dans le cerveau même 15 ans après le collège, mais la récitation collective d’un mantra.
Pour être tout à fait honnête, à mon arrivée, je me suis vite dit que j’allais simplement me contenter d’écouter mes petits camarades chanter (puisque bon, tout le monde ayant les yeux fermés, ce n’est pas le manque de votre voix qui se fera ressentir) et sauter ce truc de perchés.
Mais j’ai rapidement pu constater l’effet de cette vibration sur le plan individuel que collectif et du calme et de la cohésion que celle-ci apporte.
S’agissant de la formation en général, j’avais 9 heures de cours par jour, dont 3 heures de pratique pour les deux premières semaines, puis quasi 5 heures de pratique à l’issue de la deuxième semaine, ce qui n’était pas de tout repos pour le corps.
Nos cours étaient composés comme suit :
Hatha yoga (qui est le yoga de base, celui dans lequel on tient davantage les postures),
Ashtanga yoga (qui est un type de yoga composé d’une séquence de 84 postures que l’on enchaîne en suivant un ordre particulier, sans pouvoir y déroger),
Kundalini yoga (yoga basé sur les différents centres d’énergie de notre corps, appelés « chakras », pratiqué en vue de nettoyer ces chakras),
Pranayama (contrôle de la respiration en vue d’augmenter notre énergie vitale, appelée « prana »),
Shatkarma (actions pour nettoyer le corps dont je vous passerai les détails),
Méditation,
Philosophie du yoga,
Anatomie,
Méthodologie pour enseigner,
Alignement et ajustement (afin de pouvoir nous permettre de corriger nos futurs étudiants lors de nos cours),
Ayurveda (qui est la médecine traditionnelle indienne, qui est fort éloignée de notre chère et tendre médecine allopathique puisqu’elle prend en compte le corps et l’esprit),
Naturopathie.
Avec autant de matières au programme en un mois, autant vous dire que je ne suis pas encore prête à parler anatomie avec ma sœur adorée, le Docteure (avec un e) Alessandri.
Mais je suis ressortie avec des étoiles dans les yeux de chacun de ses cours, sans exception, et une liste de bouquins à poncer pour approfondir ma connaissance dans tous les domaines.
Je ne saurai vous cacher mon émerveillement face à toutes les connaissances que j’ai acquises ici. Qu’il est bon d’aller en cours avec l’envie d’apprendre ainsi que la certitude que ce que l’on va apprendre nous sera utile pour la suite de notre vie.
Ok, je ne vais pas mentir, se faire réveiller par un réveil qui n’est pas le sien tous les matins à une heure qui n’est pas celle que vous aviez prévue (soit 5h28 quand vous aviez programmé votre réveil à 5h47), ça ne vous donne pas toujours envie de sauter du lit pour être le plus rapidement possible dans la salle de classe. Mais une fois que vous êtes assise sur votre petit matelas vert Décathlon bien confortable (que TOUT LE MONDE M’ENVIAIT) et que vous vous retrouvez à chanter ce petit OM après vous être concentrée quelques instants sur votre respiration, quel bonheur.
Parce que oui, notre salle de classe a pour seul meuble une estrade pour que le professeur s’assoit dessus. Ici, les étudiants sont assis par terre. Si au premier abord ça peut sembler cool, les premiers jours ont plutôt été de l’ordre de la torture physique.
Qu’il est difficile de rester longtemps assis dans une position qui n’est pas irrespectueuse pour le professeur et surtout qui ne vous fait pas mal au dos. Et c’est là l’objet même du yoga : pouvoir trouver du confort dans une posture inconfortable et ce, dans le but de pouvoir méditer des heures/jours durant.
Heureusement pour nous, les professeurs connaissent leur public (les fameux « western people ») de sorte qu’ils sont bien plus tolérants avec nous qu’ils ne le seraient avec des étudiants indiens.
En tout état de cause, si déjà avant vous vous moquiez de moi parce que je me tenais droite lorsque j’étais assise, vous n’êtes pas prête à voir la nouvelle Eléa Alessandri.
Nous avions trois breaks dans la journée : un premier de 9h30 à 11h00 (oui oui, premier cours à 6h et déjeuner à 9h30 : on est bien loin de la pensée selon laquelle il faut déjeuner en sautant du lit pour vous donner de l’énergie), puis un second de 13h30 à 15h00 et enfin un troisième de 16h30 à 17h00.
L’occasion pour moi de me restaurer à l’école, de me goinfrer dans les cafés du coin, mais également de m’adonner à quelque chose d’essentiel pour tout Alessandri digne de ce nom : FAIRE UNE SIESTE.
S’agissant de l’organisation en elle-même, on part sur une organisation à l’indienne : peu d’informations ou peu fiables mais pour une raison que l’on ignore et qui est assez surprenante, tout se déroule toujours bien.
Aussi, nous avons eu les informations sur nos examens quatre jours seulement avant de passer le premier, parce que l’on a posé des questions.
En définitive, chacun d’entre nous a dû animer un cours de 45 minutes à un groupe composé de 7 autres personnes, incluant des postures, un exercice de contrôle de la respiration et de la méditation, en sus d’un examen écrit d’une durée d’1h30 (dont les questions ne changent pas d’un groupe sur l’autre donc autant vous dire qu’on a tous passé le test haut la main).
Crédibilité et valeur de mon diplôme ? Absolument 0.
Mais tout de même pas peu fière !!
Parlons maintenant de la nourriture.
Après un mois de nourriture indienne à raison de trois repas par jour, je peux vous dire que mon palais n’est toujours pas habitué aux épices.
Ici, j’ai plus pleuré à cause de ces dernières que de rire. C’est pour vous dire.
Hormis ce léger détail, on était tous d’accord pour dire que la nourriture de l’école était excellente.
Le seul inconvénient majeur est qu’elle était composée de seulement 10 éléments, répartis sur trois repas, à savoir :
Du riz,
Des chapatis (sorte de crêpes),
Des légumes épicés (trop épicés, ça vous l’avez compris),
Un dal de légumineuses,
Des crudités le midi,
D’un mélange de quelques fruits (papaye, orange, ananas, banane),
Une tranche de pain de mie,
Du beurre,
De la sauce à la coriandre,
De l’eau chaude aromatisée à quelque chose que personne n’a jamais découvert.
Autant vous dire que pour une petite gonzesse qui a en horreur la routine et qui, jusqu’à il y a un an, détestait manger des restes, ça a été plutôt challengeant.
Raison pour laquelle, au bout de la deuxième semaine, j’ai décidé que j’irais me faire péter du houmous, des œufs, de l’avocat et du café tous les matins au café du coin, et une grosse crêpe au Nutella pour les jours de fête.
Maintenant que j’ai planté le décor, il me reste désormais à vous parler du dernier détail qui me tient à cœur : ce que je retire de cette expérience sur le plan personnel.
J’adorais déjà le yoga pour le calme et la sérénité que cela avait apporté dans ma vie.
Je pense que tous mes proches ont pu constater chez moi des changements majeurs au cours de ces deux dernières années, que je dois en bonne partie à la découverte de cette pratique et tout ce qui en a suivi derrière.
Ainsi, avant d’arriver en Inde, j’étais déjà persuadée que le yoga pouvait faire des prouesses sur les esprits, et notamment sur ceux aussi mouvementés que le mien.
J’ai cependant, une fois de plus, eu l’opportunité de vivre des expériences très fortes sur le plan émotionnel, puisqu’il m’est arrivé à plusieurs reprises de pleurer à chaudes larmes, en cours de yoga kundalini (yoga pratiqué en vue de nettoyer les centres d’énergie principaux de notre corps, appelés chakras), mais également en cours de méditation, et de ressentir, dans ma chair et mon corps, les vibrations de cette libération, laissant par la suite de nouvelles sensations très agréables me parcourir.
De même, par la récitation collective de mantras dans diverses situations (et pas seulement le « OM »), j’ai pu constater la puissance des vibrations sur le corps humain et l’impact que cela pouvait avoir. Peut-être connaissez-vous le principe des bains sonores ou des bols tibétains et donc pouvez comprendre ce que j’entends par là.
Si j’étais déjà convaincue de l’importance des paroles gratifiantes (coucou la théorie des cinq langages de l’amour et toutes les personnes que j’ai bassinées avec cette théorie cet été), de la bienveillance, de la tolérance, du pardon, de la gentillesse, je suis désormais convaincue que cultiver l’amour et la pensée positive au quotidien est la clé de tout.
Au cours de ce mois, j’ai vu des personnes se transformer, s’ouvrir à l’amour, à l’inconnu.
Je me suis vue lâcher prise au fur et à mesure sur des situations, accepter, m’adapter.
J’ai une fois de plus pris conscience de notre mental et de notre fâcheuse tendance à nous identifier à nos émotions, qui ne sont que de passage et ne définissent en rien notre être.
J’ai pris dans mes bras un nombre incalculable de personnes. J’ai eu mal aux zygomatiques à force de sourire.
J’ai appris des choses merveilleuses sur le plan théorique et sur ma personne.
J’ai eu une énergie débordante du début jusqu’à la fin malgré un rythme intense et aucun coup de mou.
J’ai rencontré des personnes toutes aussi inspirantes les unes que les autres, avec des rapports à la spiritualité différents, dont j’ai reçu énormément d’amour et à qui j’ai donné autant d’amour en retour.
J’ai longtemps hésité avant de venir faire cette formation, au vu de mon budget très serré et de mon départ pour l’Australie par la suite. Je sais désormais que c’était le meilleur choix que je pouvais faire pour mon chemin personnel.
Pour ceux qui ne le savent pas, j’ai récemment décidé de tirer ma révérence au monde des avocats, ce qui était loin d’être une décision facile.
Je ne regrette en rien mes années de travail auprès des différents avocats pour lesquels j’ai travaillé, mais je dois avouer qu’on ne sort pas indemne de ce domaine.
J’ai vu de nombreuses personnes se déchirer pour des problèmes vraiment futiles, au travail, à l’école, à la maison, avec les voisins.
J’ai vu des personnes qui s’étaient aimées agir avec un esprit vindicatif d’une extrême violence, ne prêtant aucune attention à l’impact que cela pouvait avoir sur les personnes qui allaient être affectées.
J’ai vu des cas de harcèlement, des prescriptions médicales pour dépression à n’en plus finir.
J’ai vu des cas de violences physiques, sexuelles, morales, qui puisaient toutes leurs sources dans des violences infantiles.
Cela m’a permis cependant de confirmer que ce qui me passionnait dans ce métier, c’était la psyché et la gestion des émotions, et qu’on aiderait davantage les gens en leur apprenant à les gérer.
Car une procédure judiciaire c’est long, coûteux, pas toujours fructueux et surtout on y laissera de nombreuses plumes. Ca n’apprend pas le pardon, ou encore la responsabilisation qui sont des valeurs chères à mes yeux, mais uniquement la vindication et la haine.
Quand l’avocate martiniquaise pour laquelle je devais continuer à bosser en télétravail m’a finalement indiqué qu’elle n’était pas en mesure de me salarier, j’ai décidé que c’était le moment pour moi de dire bye bye à un milieu qui ne m’a jamais rendu heureuse sur le long terme et réaliser mon rêve de vivre à l’étranger, avec l’objectif final de me former à un métier relié de près ou de loin à la psychologie, dans le but de pouvoir aider les femmes et les enfants.
Je me suis inscrite dans cette école, non pas dans l’objectif de devenir professeur de yoga, mais simplement pour approfondir ma connaissance du yoga sur le plan théorique et pratique.
En définitive, je suis tombée amoureuse du kundalini yoga, de la méditation et du domaine énergétique, qui me passionnait déjà depuis quelque temps.
J’ai également pris conscience du vide qui s’était installé en moi à l’arrêt de la gymnastique à cause de mon problème de dos, et que la danse avait un pouvoir extrêmement libérateur sur le plan émotionnel.
Ce mois en Inde m’a à nouveau fait une piqûre de rappel sur l’impact de l’exercice physique quotidien sur la santé mentale, d’une bonne alimentation, de l’instauration d’un rythme, et surtout de l’arrêt de l’alcool, ce que j’avais déjà pu expérimenter durant mes cinq mois en Martinique.
Enfin, j’ai constaté à quel point j’avais été heureuse au cours de ce mois-ci, à faire des choses qui allient tout ce que j’aimais le plus : de l’intellect, du thérapeutique, de l’artistique, de l’exercice physique, du spirituel et de l’humain.
L’image que j’avais en tête de mon futur projet professionnel s’est donc encore plus affinée. Il ne reste donc plus qu’à me donner les moyens de le réaliser.
Pour cela, j’ai besoin de grosse moula : raison pour laquelle ma prochaine destination est l’Australie.
Il est temps pour moi de m’arrêter là, car je crois qu’on a déjà amplement dépassé le format d’une newsletter. Promis, les prochaines seront plus courtes (ou pas, hihi).
Eléa